| Extrait 
                    de Cahier d'Ubiquité - Tome 1 - (La Fable des gonades 
                    et du cerveau - Pour un libertinage amoureux et serein) - 
                    Editions Hermaphrodite - 2003 " 
                    Craignant tous nos désirs, les élans de nos 
                    corps, nous les couvrons de mots, de règles et de principes. 
                    De peur qu’ils ne s’échappent, nous les 
                    emprisonnons, nous les figeons sur place et pour l’éternité, 
                    comme un taxidermiste. Ainsi, nous les tuons. En matière d’amour et de sexualité, nous 
                    demeurons binaires et caricaturaux, dans nos actes comme dans 
                    nos pensées. Nous oscillons sans cesse d’ascèse 
                    en décadence. Perdus dans nos idéaux ou noyés 
                    dans un anti-idéalisme absolu et sans exigence, nous 
                    demeurons incapables de vivre et de penser, véritablement, 
                    par-delà l’idéalisme.
 Nous admettons qu’un homme consomme quelques dizaines 
                    de femmes jusqu’à l’âge de trente 
                    ans (on appelle cela “ profiter de sa jeunesse ”) 
                    à condition qu’ensuite il jure fidélité 
                    jusqu’à ce que mort s’ensuive. Nous tolérons 
                    le Vatican ou Sade, le mariage parfait ou l’adultère 
                    navrant, l’amour platonique prétendument “ 
                    spirituel ” ou le film pornographique, le couple bourgeois 
                    ou le donjuanisme féodal et sordide. Entre ces deux 
                    extrêmes, ou plutôt au-delà : rien.
 Ainsi persévérons-nous dans la névrose 
                    et l’insatisfaction, la gène, l’ennui ou 
                    l’explosion soudaine, violente, rédhibitoire. 
                    Dans tous les cas nous ratons tout, incapables que nous sommes 
                    de trouver dans la réalité l’incarnation 
                    de nos idéaux et incapables d’assumer en pensée 
                    nos pulsions naturelles, inconstantes mais réelles. 
                    Dans le mariage bourgeois, comme dans le donjuanisme débridé, 
                    c’est la mort qui triomphe, soit par endormissement, 
                    soit par épuisement de l’amour et de l’autre 
                    ".
  
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